
Hygiène financière des PME: soyons exigeants
Que ce soit pour améliorer sa rentabilité, faire des investissements ou encore dormir tranquillement la nuit, le suivi financier de sa société est un élément clef de la gestion de l’entreprise.
Échangeant avec beaucoup d’entreprises, je suis souvent surpris par le manque de rigueur ou de connaissances pour la réalisation d’un bon suivi financier. Il n’est pas rare que les dirigeants ne connaissent pas la rentabilité de leur entreprise ou encore la situation exacte de leur chiffre d’affaires au fil de l’année. Avec quel risque ? Celui – entre autres – de devoir prendre des décisions sans anticipation. Un calcul (hautement) périlleux, vous en conviendrez. La prévoyance paie, encore plus couplée à l’exigence.
Personnellement, les premiers outils financiers que je mets en place sont le budget ET le suivi de celui-ci tout au long de l’année (forecast).
Prévoir son budget (longtemps) en avance
Courant septembre déjà je commence à travailler sur une première version du budget… de l’année suivante donc. À ce stade, la précision est certes relative, mais cela permet de constater la manière dont a évolué le chiffre d’affaires, mais aussi les charges, tout en ouvrant la possibilité de commencer à se projeter sur les objectifs de l’année suivante. Anticiper, pour mieux agir. Car c’est souvent lors de cette première étape que l’on peut réfléchir à des décisions importantes comme engager des collaborateurs ou à l’inverse réduire les charges de l’entreprise. Bref: trouver des solutions à un moment relativement calme, ce qui est un vrai luxe lorsque l’on est entrepreneur.
Mutualiser le budget pour préserver sa trésorerie
Ce budget va inévitablement subir des modifications au cours des derniers mois de l’année, pour atteindre une version définitive normalement à fin janvier lorsque la vision de l’année qui s’est écoulée s’éclaircit. Mais l’exercice ne s’arrête pas là. Une bonne pratique est de ne pas faire juste un budget annuel, mais de – déjà – essayer de structurer le budget mois par mois. Ainsi, l’on peut estimer le chiffre d’affaires réalisé mensuellement, et donc combien d’argent devrait arriver sur le compte chaque mois (les fameux cycles de l’activité). Le suivi de trésorerie devient dès lors beaucoup plus simple.
Le Forecast: outil financier, mais aussi managérial
Plus important encore que le budget à mes yeux, c’est la réalisation au minimum chaque trimestre d’un «forecast». L’idée est de comparer la réalité des chiffres avec le budget pour le trimestre passé et aussi d’estimer les futurs chiffres des prochains mois. Et voir ainsi si l’entreprise est saine, ou non. Quand j’ai repris la direction de Silicom, nous avons passé beaucoup de temps avec le CFO pour comprendre chaque dépense et nous avons pu constater que passablement de charges ne figuraient pas au budget comme des formations, des frais de déplacement, des petits abonnements, etc… Mis bout à bout cela peut faire beaucoup de «surprises» et un écart important entre la réalité… et le budget. En parallèle, je demande aux équipes de direction de participer à la réalisation du forecast en donnant les estimations de chiffres d’affaires de leur département, tout en vérifiant qu’ils ne dépenseront pas plus que le budget initial. Cette implication demande un minimum de management, mais partager ce document avec les équipes de direction a pour avantage de garantir un langage commun entre toute la direction et cette transparence oblige chacun à maitriser son département.
Pour beaucoup d’entrepreneurs, la finance fait peur. Le réflexe est (trop) souvent de négliger cette discipline financière. Il me semble toutefois très compliqué de diriger une entreprise sans avoir un niveau minimum de compréhension financière, ou à minima de se faire aider pour cela. Même si très peu de PME ont les moyens d’avoir un directeur financier à plein temps, il est toujours possible de faire appel à une fiduciaire ou d’engager un directeur financier à temps partiel. Cet investissement est pour moi le meilleur qu’une entreprise puisse (se) faire.